l’Averse (didascalie)

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La scène se passe dans l'allée centrale du marché. Côté cour, la boucherie vis-à-vis de la poissonnerie, côté jardin. Chacune égrène son chapelet de chalands. Le jeune homme est l'antépénultième client de la boucherie. Immédiatement derrière lui, un homme petit, moustachu, en passe d'être chauve, le regard craintif, et puis une dame allongée vêtue d'un imper aubergine sur une longue jupe sombre. Le jeune homme tient dans sa main gauche un cabas et dans la droite un petit porte-monnaie.

À l’appétissant charnier de la boucherie correspond, comme un reflet trompeur, une congrégation vague de mystiques blasés. Ici une carapace, là de la chair et du sang ; tant d’yeux regardent tant d’os ; lit de glace pilée, bouquets de persil. Le jeune homme hésite entre les escalopes de veau et les côtelettes d’agneau.

Arrive un vieillard tremblotant traînant un chariot à provisions ventru et très rempli. Il porte un ensemble assorti, y compris la casquette, mais la veste est trop grande. Ou bien est-ce l’impression que donne sa voussure accusée ?

Il semble peiner à déchiffrer l’inscription griffonnée sur une ardoise :

« 1/2 12aine

+

verre muscadet

40F ».

Il a stationné son caddie dont le rabat baille. Le jeune homme remarque distinctement la main gauche du vieux saisir une grosse huître, prestement escamotée dans la sacoche. Le vieux reprend sa claudication.


Lever de rideau.